[2010] Arrivée au port

Maitre du Jeu Messages : 149 Age : 31

Le soleil se levait sur la ville d'Umbar, et les routes commençaient à voir affluer les visiteurs et commerçants désirant pénétrer dans l'enceinte de la cité. De même, le port grouillait de navires marchands, qui débarquaient leurs cargaisons dans un vacarme général retentissant, auquel s'ajoutait le cri d'oiseaux semblables à des mouettes qui raillaient les efforts des habitants depuis le ciel de leur voix rauque.

Parmi toute cette agitation, un bateau de transport revenait d'une escale dans un port d'Arnor, amenant avec lui marchandises et passagers. Parmi ces-derniers, comme étrangères au milieu de cette masse humaine qui débarquait, se tenaient Lhunara et Ysabelia. Les deux elfes se frayèrent un chemin dans la tumultueuse cohue du bord des quais de débarquement, aidées en cela par Borric, qui leur traçait pour ainsi dire la route, écartant les importuns sans ménagement.

Borric était un jeune homme d'une petite vingtaine d'années, de taille moyenne. Il était vêtu de vêtements de rôdeur d'Ithilien, ainsi que d'une tunique, d'une cape à capuche et d'un manteau, toutes de couleur sombre. Ses cheveux bruns étaient coupés relativement courts, et une barbe de plusieurs jours commençait à faire jour sur ses joues. Ses yeux verts, attentifs à toute possible menace, scrutaient la foule à la recherche d'un ennemi éventuel. Il portait un arc long et un carquois en bandoulière dans son dos ; deux couteaux étaient glissés dans ses bottes ; il disposait aussi d'une dague et d'une épée dans leurs fourreaux.

A force d'efforts et de persévérance, ils avaient quitté Fornost huit jours plus tôt, pour joindre un port sur la côte Ouest d'Arnor, plus au Nord que les Havres Gris et les Montagnes Bleues. Là, ils avaient embarqué pour ce lieu qui empestait la sueur humaine et le sel de la mer. Borric avait de plus reçu une mission de Kaleth : découvrir ce qui se tramait contre l'influence de la Guilde de l'Ombre en Umbar et en Harad. Il devait également veiller sur Lhunara et Ysabelia, d'après Kaleth lui-même. En attendant, il cherchait un informateur, et, une fois sortis de la foule qui gonflait les quais, ils s'enfoncèrent dans les rues, Borric s'arrêtant de temps en temps pour interroger des mendiants, à la recherche de son point de rendez-vous...

Lhunara regardait, loin devant elle, le soleil se lever. Accoudée à la proue, elle repensait aux changements qui avaient bouleversés sa vie. Depuis son amour déçu jusqu'à la rencontre d'Ysabelia, de son séjour à Rhûn jusqu'à sa discussion avec le Maître Assassin Kaleth. Que serait-elle maintenant- si tous ces évènements ne s'étaient pas produits ? Si elle n'avait pas pris les mêmes décisions ? Se porterait-elle mieux à l'heure actuelle, ou non ? Beaucoup de questions qui ne pourraient avoir de réponses.

Détournant son regard vers les eaux sombres, elle repensa à tous les mauvais chois qu'elle avait été amenée à faire. Elle espérait faire mieux désormais. Désormais qu'elle avait rencontré Ysabelia. Cela avait été un changement pour l'elfe. Repensant à son passé comme elle le faisait là, elle s'était jurée de changer, s'était juré que les décisions autrefois désastreuses qu'elle avait faites autrefois se changeraient , devenant plus positives, que ses actes, changés de même manière, la rendrait plus fière d'elle...ou du moins moins déçue.

Le capitaine cria une phrase qui la tira de ses pensées plus optimistes que d'ordinaire. Portant son regard sur sa gauche, elle vit le fameux port de la Cité des Corsaires. Elle était arrivée en Umbar.

A la suite de Borric, un jeune homme envoyé par Kaleth pour les accompagner, elle descendit du navire. De son visage, toujours nimbé de ténèbres en raison de la capuche rabattue sur ses sombres cheveux, on n'apercevait les reliefs de son visage. Vêtue, comme à son habitude, d'une tunique moulante de cuir sombre, elle gardait ses mains non loin de ses armes dissimulées. Elle était sur ses gardes...qui savait qui pouvait essayer d'attenter à leur vie ? Si Borric semblait apte à se défendre, Ysabelia le semblait moins...Lhunara devait veiller à ce que leur petite troupe reste intact.

Croisant le regard peu assuré d'Ysabelia, Lhunara lui adressa un sourire rassurant. Tant qu'elle restait à ses côtés, il ne lui arriverait rien. Puis elle emboîta le pas de Borric. Ils avaient un indicateur à trouver, et une mission à mener à bien pour Kaleth. Bien qu'elle ne sache pas encore de quoi il s'agisse, si le Maître Assassin avait décidé de la relever de son poste de Dame à la Cour en fournissant une couverture suffisante pour ne pas éveiller les soupçons, c'est qu'elle avait un rôle à jouer dans ses plans.
Elle se jura qu'elle ne le décevrait pas. Ni lui, ni Ysabelia...Ni elle-même.

[Désolée du retard. x)]

J'avais vu s'éloigner les côtes arnoréennes avec un curieux sentiment de malaise. Accoudée à la proue, un léger vent caressant ma peau, j'avais vu ma vie se perdre à l'horizon. Et, contre toute attente, cela m'avait fait mal.
Pourquoi?! Depuis toujours, je ne voulais qu'une nouvelle chance. Repartir à zéro, loin de ce qui m'avait rendue triste, malheureuse, qui m'avait fait pleurer tant de soirs. J'en avais tellement rêver!
M'envoler avec une amie, chercher un avenir plus beau, arrêter de souffrir, apprendre à rire, à ne plus avoir peur... Je n'avais toujours voulu que cela et à présent, j'y étais.

Mais quelque chose clochait. Chaque fois que je levais mon regard vers le ciel brumeux, je sentais ma gorge se nouer. Cette grisaille, pourtant, je l'avais toujours haït. Elle ne m'inspirait que mélancolie.
Cependant, depuis quelque temps, je la trouvai jolie, fascinante, cette couleur pourtant mille fois aperçue. Je lui trouvai des nuances douces, tendres alors que je l'avais toujours perçu comme glaciale, dure. Et à présent que je le quittai, mon ciel ténébreux, je me sentais toute chose.
En allant vers le Sud, je ne le reverrai jamais...
Celui auprès duquel j'avais vécu, mon ciel triste et beau qui était tellement à mon opposé, que j'avais détesté et dont je ne découvrais la beauté qu'en partant, à présent qu'il n'était plus là. Je regrettai déjà.

Lorsque je me rendis compte que je n'avais plus du tout envie d'aller au Soleil et de le quitter, nous étions trop loin. Trop tard, Ysabelia!
Résignée, je passai le voyage en tentant de faire bonne figure. Lhunara ne s'y trompa pas mais je m'obstinai à rester muette ou bien à l'assommer à coup de "Je vais bien.". Et l'elfe avait d'autres choses à penser, elle passait la plupart de son temps sur le pont, rêveuse.
Le trajet jusqu'à Umbar me sembla durer une éternité et le matin de notre arrivée, je me sentais épuisée. Je descendis du navire à la suite de Borric et Lhunara. Le jeune homme ouvrait la marche, fendant la foule.
Retrouvant mes airs craintifs, je me faufilai dans leur sillage, me faisant la plus discrète possible. Je ratai mon coup en m'excusant sans cesse auprès des passants que je bousculai, Lhunara dû m'attraper par l'épaule plusieurs fois, patiente. Nous quittâmes alors le port pour lui préférer les rues même d'Umbar.

Je n'avais aucune idée ce que nous fabriquions, mais Borric cherchait visiblement quelque chose. Il interrogeait les passants à voix basse, ne nous adressant pas un mot. Je me sentais assez inutile. Suivre bêtement un inconnu était mon genre, je l'avoue. Mais m'enfoncer dans des ruelles de moins en moins fréquentées me dérangeai, d'autant que je n'avais aucune idée de l'endroit où nous allions.
Au bout d'une trentaine de minutes à tourner dans la ville, je finis par m'inquiéter pour de bon après avoir croiser un mendiant unijambiste particulièrement effrayant. Non mais où allions-nous tomber?!
"Borric, excusez-moi... Que cherchons-nous?"

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[Désolé de la période d'absence, mais maintenant le second trimestre est fini, on repart donc =) Mais j'ai perdu le brouillon du message que je voulais poster, donc je maintiens un suspense le temps de retrouver ce fichu papier ><]

Borric se retourna, et dévisagea longuement chacune des deux elfes qui l'accompagnaient. Il avait l'air soucieux, et pendant plusieurs dizaines de secondes, ne dit mot, semblant jauger Lhunara et Ysabelia du regard. Sur son visage se lisait une tension intérieure assez prononcée, et il jetait fréquemment des regards de droite et de gauche, afin de vérifier que la ruelle dans laquelle ils se trouvaient était toujours aussi vide que dix secondes plus tôt.
Lorsque finalement, il ouvrit la bouche, se ne fut pas pour répondre à la question qu'on lui avait posée :

"Avant toute chose, Mademoiselle, il faut que vous me promettiez de toujours obéir sans discuter aux ordres que je vous donnerais tant que nous serons ici, en terre ennemie de la Guilde. Cela vaut pour vous également, Maîtresse Lhunara.
Maître Kaleth m'a demandé de vous ramener à lui entières... toutes les deux. Et je ne peux pas le décevoir."

Il y eut un temps de battement, alors que Borric vérifiait de nouveau les ruelle, puis guettait si un signe de contestation apparaissait sur les visages des elfes. N'en voyant aucun, le jeune homme continua, d'un air de conspirateur :

"Nous avions rendez-vous ici avec un contact, un homme de la Guilde, qui devait nous mener au centre de la Guilde d'Umbar... Or, comme vous pouvez le constater, il n'est pas là.

Je tiens à ce que vous vous rendiez bien compte que ce n'est ni un jeu, ni une promenade de santé : je serais surpris que nous ne soyons pas bientôt mis en danger, tous les trois. alors, il faudra se montrer très prudents.

En ce moment, je suis face à un dilemme, mais peut-être pourrez-vous m'aider à me décider : je ne sais pas si nous devrions retourner en Arnor pour prévenir Kaleth des changements, et attendre d'autres ordres ; ou si nous devrions enquêter ici, quitte à envoyer ensuite un message au Grand Maître afin qu'il nous rejoigne...

Qu'en pensez-vous ?"

Pas une seconde, l'option "rester" ne tint la comparaison. En fait, cela ne m'effleura même pas. Absurde. Quelques semaines plus tôt, j'aurais tout donner pour être ici. Je me serais damnée pour une nouvelle vie, qui s'offrait à moi à présent, et pour ne plus avoir à affronter mes démons. D'ailleurs je m'étais offerte à la Guilde, reniant ainsi mes principes, pour un peu de paix...
Ce que j'espérai depuis des siècles, je l'avais enfin. Mais quelque chose avait changé.

Ou plutôt, quelque chose en moi avait changé. Depuis un certain soir d'hiver, huit jours plus tôt. Trop innocente encore, je ne parvenais pas à comprendre ce que je ressentais, ni ce qui avait exactement déclenché mon doux tourment. Je n'étais qu'une petite elfe pure, dont les yeux s'entrouvraient à peine sur la vie.
Alors, comment comprendre? Je n'avais jamais rien vécu.
La seule chose que je savais, c'était que j'avais besoin de rentrer à Fornost. Je n'étais pas à me place, sans lui. De toute ma vie, je n'avais été vraiment heureuse qu'une poignée de minutes et elles s'étaient écoulées près de lui. Encore une fois, j'ignorai pourquoi. Le hasard, peut-être.
Ou peut-être pas.
Mais je voulais que cela recommence.
Mon ciel ténébreux, ma référence, je voulais absolument le retrouver! Le Nord était mon passé, certes, mais aussi le théâtre de ma vie et j'avais compris que je ne chasserai pas mes démons en leur tournant le dos. C'était puéril, stupide et lâche.
En somme, j'avais grandis.

Naturellement, jamais je ne changerai. J'étais ainsi: fragile, naïve, timide, terriblement sensible et craintive; pour toujours. Telle était ma nature profonde. Mais l'enfant que j'étais, cette enfant qui courait depuis toujours après une vie qui n'était pas la sienne simplement par peur, elle était en train de se muer en une toute autre entité: une femme. Une Ysa' semblable et différente.
Semblable parce qu'à jamais, je serais la même. Différente parce que mes immenses yeux noisettes s'ouvraient doucement et que mon coeur apprenait à connaître les sentiments desquels j'avais été si longtemps privée.
A présent, tout semblait différent... j'avais envie d'y croire!

"Rentrons, proposai-je en me mordillant sauvagement la lèvre inférieur.
Borric n'avait pas l'air contre mais tourna son regard vers Lhunara. Je fis de même et l'interpeller silencieusement à grands renforts d'yeux implorants. Elle me considéra un instant avant d'acquiescer lentement.
Un immense sourire éclaira alors mon visage et mes yeux brillèrent de reconnaissance alors que Borric, à son tour, approuvait. Lhunara me rendit mon sourire, intriguée.
Fantastique!
Il me suffit d'un coup d'oeil pour faire mes adieux au ciel bleu et lumineux. Sans regrets.

[Sujet clos, on retourne en Arnor.]

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