[Concours Rp: Elemna] Une petite ville grandement perturbée.

Lorsque le soleil se leva sur l’Eriador ce matin-là, très peu de breeois se promenaient comme à leur habitude. En effet, cela faisait presque deux semaines maintenant qu’il se faisait rare de voir des habitants sortir de chez eux de si bonne heure. Ce n’était que lorsque le soleil se trouvait bien haut dans le ciel que la ville commençait à s’animer. Il était tout simplement impensable de se balader alors que la nuit ne s’était pas complètement dissipée par les temps qui couraient.
C’est pour cette raison que quand les habitants virent un homme marchait tranquillement dans les rues, il s’imaginèrent que c’était « l’un d’entre eux, ceux qu’on aimerait de ne jamais avoir vu ». Et puis, les craintes s’envolèrent rapidement quand ils comprirent à qui ils avaient à faire. L’un des habitants sortit de sa maisonnée et s’élança à grandes enjambées vers cet homme:

- Hellébore! Hellébore! Voyons que fais-tu ici à cette heure-là? Puis il ajouta à voix basse, tu sais bien qu’ils n’aiment pas nous voir si tôt… .

L’homme qui se prénommait Hellébore, le fixa quelques instants puis l’écarta de son passage d’un geste vif du bras droit. Il continua ainsi à marcher, et poussa un long soupir. Tel était la personnalité de cet homme. Méprisant, égoïste, agressif, certains diront mauvais, se désignant comme la brute du village. Pourtant, tout le monde le respectait. Peut-être était-ce pour la simple et bonne raison qu’il avait passé la quarantaine. Mais il y avait autre chose bien sur. Les breeois sont secrets, renfermés mais tous connaissait cet homme, et tous connaissait sa vie. Son visage reflétait la dureté, une froideur qui était sûrement à l’origine de son nom: « la rose de l’hiver », magnifique plante toxique. Il vivait seul dans une petite maison excentrée du village, et était mystérieusement arrivé à Bree une nuit il y a plus de quarante ans. On sut plus tard qu’il fut abandonné par ses parents, et refusa catégoriquement l’aide des autres. Il était sans scrupules, coléreux, mais sans aucun doute terriblement intelligent.
Hellébore continua donc sa route, avançant lentement, jetant des coups d’œil à gauche puis à droite avant de marmonner des paroles inintelligibles. En faite, il observait. Cherchait des yeux les rôdeurs qui protégeaient avant cette bourgade, puis il regardait les magasins dévastaient, les commerces tout simplement détruits, et d’un air las il tournait son regard vers les fenêtres et y voyait des dizaines de personnes qui passaient discrètement leurs têtes à travers les rideaux. Hellébore n’aimait ni les curieux ni les lâches, et c’est les deux termes selon lui qui résumaient le mieux le comportement des breeois en ce moment. Ensuite, ils les pardonnaient évidemment car ils étaient juste paralysés par la peur. Toutes les nuits ils pouvaient entendre le bruit du verre signifiant qu’à nouveau un commerce venait d’être saccagé, ils entendaient aussi les malheureux cris d’une jeune fille sûrement attrapée par « les autres », cela était devenu le quotidien du petit village calme d’autrefois.
Menaces ou pas, il fallait intervenir et ceux quelques soient le prix à payer. L’homme était perdu dans ses pensées, lorsque son ami de tout à l’heure revint et se plaça juste en face de lui. Il paraissait paniqué et désespéré, il représentait ainsi toute la population:

- Ils ont encore frappé! Cette fois ils s’en sont pris à la forge d’Elatior.

Il ne put prononcer autre chose car il tomba à genoux devant le colosse qu’était Hellébore, les mains portaient au visage cachant ses yeux rougis par les larmes. Contrairement à un peu plus tôt, Hellébore posa une main réconfortante sur l’épaule de l’homme qui sanglotait et lui dit ces mots:

- Ca ne peut plus durer! Il faut les arrêter et ce très rapidement avant que cette ville si vivante devienne une ruine sans âme!

Les sages paroles d’Hellébore résonnèrent dans toute la rue, et très vite, la population fut au courant que l’homme qu’on prenait pour un des plus méchants du village, voulait sauver Bree des mains de ces malfrats armés et avides de crimes.

Décision prise, Hellébore accompagné de son ami encore marqué par sa crise de larme d’un peu plus tôt, se dirigea vers l’auberge du village. Il devait être midi et les habitants de Bree commencèrent seulement à sortir de leurs maisons pour prendre des nouvelles du pillage qui avait eu lieu pendant la nuit. Pour ce genre d’informations, c’était sans aucun doute au Poney Fringant qu’il fallait aller. Tenue depuis très longtemps par la famille Poiredebeurré , c’était un lieu de rassemblement, où avait lieu de nombreuses discussions des plus insignifiantes aux plus importantes. Si bien que lorsque Hellébore pénétra dans l’auberge, il se trouvait déjà bon nombre de personne: hommes, hobbits, étrangers, ceux-ci ailleurs n’arrivaient jamais à se fondre dans la masse. Ce jour-là, le vieil homme ronchon qu’était notre homme remarqua que les inconnus venus d’autre part étaient nettement moins nombreux qu’avant. Avant que ce chaos ne s’abatte peu à peu sur Bree. Une raison de plus pour se révolter pour Hellébore.
Ainsi, il marcha bruyamment jusqu’au comptoir, ne prenant pas la peine de saluer le gérant comme chaque jour, puis il prit appui sur un tabouret et se hissa sur le comptoir. Il faisait face à tous les clients, debout, il sentit dès lors un sentiment de supériorité monter en lui. Il réprima un sourire en coin et regarda une par une chaque personne présente. Il y en avait de toutes origines, et bien sur toutes arboraient un visage fermé, brisé, abattu, malheureux devant le désastre que les bandits infligés à leur village.
Hellébore s’apprêtait à prendre la parole, quand il aperçut au fond de la salle un bandit. Facilement reconnaissable par les nombreux couteaux qu’ils accrochaient à leur ceinture, les exhibant comme des trophées. Habillés dans des couleurs foncés, de pantalons, de hauts à manches longues et de gants. Ceux-ci étaient un accessoire indispensable pour mener à bien leurs agressions, ou autre atrocités sur la population et les commerces à la nuit tombée.
Ce bandit qu’il avait repéré, semblait captivé par la conversation de ses voisins de table. Il souriait. De la place d’Hellébore c’était évident, et il n’en fallut pas plus pour l’énerver:

- Toi! Pointant le doigt vers le brigand, Hellébore tapa du pied sur le comptoir afin d’obtenir l’attention de tous, et sa voix grave résonna dans toute l’auberge, comment oses-tu mettre un seul pied ici? Cela fait bien trop longtemps que vous êtes allés trop loin, toi et tes amis! Vous croyez nous faire peur avec votre étalage de couteaux, vos manières violentes, vous êtes juste une bande de brutes, stupides et lâches qui plus est!

Le bandit ne prit pas la peine de répondre, et son sourire en coin se transforma en un large rire moqueur et méprisant. Voyant que personne ne réagissait, Hellébore jeta un regard lourd de méchancetés sur les clients:

- Et vous ?! Regardez-vous? Vous vous plaignez sans cesse, pleurez tour à tour, attendez que le problème se résolve seul, mais que croyez-vous? Qu’ils vont partir comme ça demain, et qu’ils ne reviendrons jamais? Mais réagissez bon sang! Défendez-vous! Vous voulez vivre ici tranquillement, donnez-vous en les moyens! Réveillez-vous!

Chacune de ses phrases avaient été accompagnés d’un coup de poing frappé dans sa main. Son discours était certes bateau, mais il espérait que les breeois se reprennent. Après un lourd silence, quelqu’un cria: « Abats les bandits, vivre Bree! » S’en suivit des dizaines d’autres exclamations et d’applaudissement. Hellébore était descendu de son poste et s’approcha du brigand qui regardait la scène sans aucune expression ci ce n’est ce petit sourire en coin qui agaçait au plus au point Hellébore. Il l’attrapa par le col de son vêtement, le relevant ainsi à sa hauteur. Visage contre visage, Hellébore lui chuchota ces mots:

- Va prévenir tes compagnons, Bree ne se laissera plus faire!

Il le poussa ensuite dehors avant qu’il n’eut l’occasion de parler. La révolte était en marche, et Hellébore se présentait comme le leader de la population, le sauveur du village, chose qu’il n’aurait jamais imaginé quelques semaines auparavant.

En une seule journée la nouvelle avait fat le tour de Bree: la révolte allait faire rage, et ceux sous l’ordre d’ un unique homme Hellébore. Les habitants se rejoignirent à l’auberge du Poney Fringant pour fêter leur nouvel état d’esprit. Ils allaient se battre pour rendre à leur village le calme et la beauté d’il y a quelques semaines.
Ce soir-là, Hellébore ne se coucha pas seul pour une fois dans sa petite chambre, il était habité par les paroles des dizaines d’habitants qui croyaient en lui. Il voulait bien évidemment sauver la ville, mais cette raison n’était pas entièrement la cause de son bonheur. En effet, il détenait le pouvoir, il avait été le premier à s’être énervé, celui qu’on suivrait jusqu’au bout, le chef. Chacun savait que c’était son unique but dans sa vie, mais personne ne prêta attention que c’est à partir de ce jour-là qu’il l’avait atteint. Et cette joie qu’il ressentait, fut assombrie par l’idée que lorsque cette histoire serait réglée, il devra trouver un autre objectif à sa vie et n’avait pas la moindre idée de ce qu’il pourrait être.
Hellébore fut réveillé par des cris de femme. Il se leva promptement et sortit dehors pour arrêter ce qu’il pensait être une agression. Mais il n’eut pas l’occasion d’intervenir. Il s’agissait bien d’une femme et d’un bandit, mais quelle fut sa surprise quand il vit la jeune demoiselle abattre à plusieurs reprises un bout de bois sur le brigand qui était tombé lourdement à terre après le deuxième coup. Laissant tomber « son arme », la femme adressa à Hellébore un large sourire éclatant, et bien qu’il fut d’ordinaire très froid, il se sentit rougir car cela faisait bien longtemps qu’une si jolie jeune femme ne l’avait pas regardé et sourit de cette façon.
Lorsqu’il entra dans l’auberge qui était devenue le QG des habitants, Hellébore fut accueillit avec enthousiasme et put voir qu’aucun brigand ne se trouvait là. Il en conclut qu’ils avaient déjà gagné une petite bataille. Il apprit aussi qu’aucun pillage n’avait eu lieu la nuit précédente, pour la première fois depuis bien longtemps.
Hellébore décida qu’il fallait intervenir immédiatement pendant que le calme était quelque peu revenu. Il monta sur le comptoir comme à chaque fois qu’il prenait la parole en tant que « chef », et fit un geste des mains afin d’obtenir le silence:

- Vous voyez, il a suffit que nous changions de comportement pour qu’ils se méfient de nous. Il faut leur montrer notre force! Je propose de leur rendre une petite visite.

Cette nouvelle enjoua les breeois qui acclamèrent de plus bel Hellébore.

- Par contre, sachez qu’ils sont prêts à tout… C’est pour cela que je demande à tous les hommes étant capable de se battre de m’accompagner. Bien sur, nous nous battrons seulement si cela est nécessaire. Qu’en dites-vous?

Un silence suivit cette question, et un malaise s’installa. Puis quelques hommes s’approchèrent d’ Hellébore et chacun opina de la tête à son encontre. Au bout de plusieurs minutes, ils étaient une trentaine devant le colosse, les poings serrés, la mine renfrognée.

- Bien, allons-y.

Ils partirent tous en direction du camp des brigands, excentré du village comme l’était la maison d’ Hellébore.
Les bandits mangeaient quand ils virent débarquer la trentaine d’habitants. Même lorsqu’ils étaient « au repos » les bandits portaient toujours leurs couteaux. Ils étaient assis en cercle, et devaient dormir à la belle étoile puisque aucune tente ou autre installation n’étaient présentes.
Seul trois bandits se levèrent, et se postèrent face aux hommes. Celui du milieu devait être le chef car c’est lui qui prit en premier la parole:

- Que nous vaut une si gentille visite de nos chers amis?

- Arrêtez vos niaiseries! Ca ne vous va pas du tout.

Au fur et à mesure des phrases, Hellébore se rapprochait de plus en plus
des brigands:

- Je ne suis pas contre vos manières, vos buts, même si je trouve que vous n’êtes pas dignes de vrais bandits… . Mais je n’accepte pas le fait que vous restiez ici. Vous le savez tout aussi bien que moi, des bandits ne restent jamais longtemps au même endroit et ça fait plus de trois semaines que vous êtes à Bree. Partez! Partez piller un autre village, terroriser d’autres habitants, et prenez-y beaucoup de plaisir.

Les hommes qui accompagnaient Hellébore ne le reconnaissaient pas. Il était habité par une colère si profonde que personne n’osa le retenir de la déverser sur les bandits. Pour seule réaction, le chef de la bande partit dans un fou rire, ce qui déclassa chez Hellébore un excès d’agressivité. Il se saisit de son couteau qu’il avait caché sous son vêtement, et tenta de le placer sous la gorge de son adversaire. Les deux bandits qui accompagnaient le chef le stoppa immédiatement et le fit reculer non sans mal. Bien qu’ils fussent jeunes et costauds, Hellébore avait su gardé une carrure athlétique même passé quarante ans. Attendant que l’homme reprenne ses esprits, le chef des bandits prit la parole, sa voix était fluette ce qui contrasta avec son allure rebelle:

- Allons, allons mon vieux! Faut pas vous énervez comme ça!

- Sachez que s’il le faut, nous déclencherons une bataille. Nous sommes plus nombreux, mais vous êtes mieux équipés, c’est un fait. Toutefois, une bagarre vous fera automatiquement perdre des hommes, et ce serait dommage n’est-ce pas? Il arbora un sourire en coin et enchaîna, je vous laisse deux jours, soit vous partez dans un autre village loin d’ici, soit vous sacrifiez des hommes.

Il se retourna, et tous partirent laissant les bandits réfléchir. Hellébore surprit des regards appuyés de ses compagnons, et résolut de régler le problème:

- Vous préférez qu’ils saccagent notre village, ou un autre qui nous soit inconnu? C’est le seul moyen de nous débarrasser d’eux, il faut entrer dans leur jeu.

Ses amis comprirent qu’il fallait avoir confiance en lui, et ne le contestèrent pas. Ils allèrent au Poney Fringant faire part de leur rencontre avec les brigands à ceux qui étaient restés là.

Les jours de réflexion étaient passés. Hellébore le savait pertinemment et pourtant, il ne ressentait ni panique ni inquiétude, il était d’ailleurs plutôt confiant. Les deux journées avaient été calme: un seul commerce endommagé et deux légères agressions. Rien de très grave comparées à d’autres.
Hellébore se rendit à l’auberge comme toujours et attendit que le village s’éveille. C’est alors qu’un bandit surgit. Il s’agissait bien du chef, accompagné des deux brigands de la dernière fois. Les discussions cessèrent, et laissèrent place à un silence ponctué seulement des bruits de pas des trois individus dans la salle. Après une brève observation, ils fixèrent Hellébore et s’avancèrent vers lui:

- Bonjour l’ami!

- …, broncha Hellébore.

- Nous avons réfléchis et …

- Réfléchir, vous? grogna-t-il.

- Hm, je commence à vous connaître et je pense que vous savez déjà ce que je vais vous dire, n’est-ce pas?

- Possible, répliqua l’homme sur un ton de défiance.

- Vous feriez un très bon bandit.

- Possible, répéta Hellébore, en regardant cette fois le chef dans les yeux, venez-en aux faits! J’attends.

- Nous partirons contre une forte somme d’argent.

Cette annonce fut accueillie par de nombreuses exclamations de surprise, mais Hellébore lui ne sourcilla même pas:

- Oui, je vous comprends. Bree est une place stratégique, il y a beaucoup de passage. Donc si vous quittez cette ville, vous perdrez de l’argent. C’est parfaitement logique et légitime de faire une telle demande. Je reviens.

Sous la stupéfaction de tous, Hellébore se leva nonchalamment et sortit de l’auberge. Bandits et habitants se lançaient des regards menaçant mais aussi interrogateurs. Où était parti ce bon vieil homme? La réponse était simple, chez lui. Il revint une dizaine de minutes plus tard, et lança une bourse sur la table à laquelle s’était assis les trois étrangers:

-Partez maintenant! Le ton était méchant, agressif.

Le bandit jeta un coup d’œil dans le petit sac, et leva des grands yeux ronds vers Hellébore en poussant un sifflement de satisfaction:

- Ca ne se refuse pas mon cher!

Il se leva vers Hellébore et lui tendit sa main. Le vieil homme la saisit et la serra sûrement un peu trop fort puisque le bandit hurla. Sachant que c’était inconscient de déclencher une bagarre sur le moment, les trois compagnons préférèrent partir avec la bourse sans oublier de cracher aux pieds de l’homme. Devant l’expression d’incompréhension qui se lisait sur les visages des habitants présents, Hellébore comprit qu’il allait devoir leur donner une petite explication.Il savait qu'ils connaisaient déjà une partie de sa vie, mais il était temps pour lui d'éclaircir quelques passages:

- Mes parents étaient des bandits. Redoutables. Intelligents. Les meilleurs. Pourtant, ils ont trouvé plus fort qu’eux. J’avais huit ans. C’est cette année-là que je suis arrivé ici. Je les gênais dans leur fuite, alors ils m'ont abandonné, et je me suis installer à Bree. Aujourd’hui je peux enfin me dire qu'ils ont fait le bon choix. Lorsque ma mère a commencé à pleurer en me serrant dans ses bras, je savais ce qui m'attendait, alors j’ai volé des sous. Faut croire que j’avais le gêne du voleur. C’est cet argent que j’ai donné aux brigands tout à l’heure. Je savais que j’en aurais besoin un jour. Maintenant, je vais partir. Voir de nouveaux horizons, rencontrés de nouvelles personnes, me faire détester puis tenter de me faire pardonner. Je pense que je suis doué pour les deux!

Hellébore se mit à rire, et ce fut la dernière chose qu’il fit à Bree. Il y avait passé quarante de sa vie, et c’était pour lui un nouveau départ, un nouveau défi.
Il put voir les habitants le saluer au loin, crier des gentillesses qui faillit le faire défaillir.

*Espérant qu’il m’attende encore des aventures comme celles-ci quelque part… .*